Petites et grandes histoires du Collège Cévenol

Un lieu, quelques années, vus de notre adolescence

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Monday 29 November 2010

LE COIN DU BOIS

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Pension externe du Collège Cévenol dirigée à l’époque par Monsieur Eric Monnier et sa deuxième ou troisième femme d’origine allemande et qui, aussi, enseignait la langue de Goethe au Collège. Les enfants MONNIER étaient aussi sur place et dont je me souviens de certains prénoms :
Odile qui, si ma mémoire est bonne, travaillait chez le photographe du village à côté de la pâtisserie. Elle circulait avec un scooter «Vespa» gris ; fumait ses gauloises en nombre et était maman d’un bébé. Elle nous aidait quand nous avions des soucis avec nos cours d’anglais. Il y avait Annette plus âgée que nous tous et qui était me semble t-il en terminale.
Monique et Florence élèves au collège et qui dans la maison aidaient au service à table apportant ces grandes platées de « nourriture » confectionnées par la « cuisinière » Emilie (on y reviendra). Il y avait aussi des garçons Monnier mais je ne me souviens pas des prénoms.

Tout d’abord il faut rappeler que l’on accédait à l’intérieur de la maison que par la porte de la cave (avec interdiction formelle d’utiliser la porte principale cette issue étant toujours verrouillée) sans oublier de s’être déchaussé dans un local assez lugubre dont les murs étaient couverts de casiers en bois ouverts et chaque pensionnaire en avait un . L’on y mettait toutes nos chaussures. De temps en temps quelque pensionnaire s’amusait à un mélange de chaussures… Ensuite nous avions accès à l’étage où il y avait la grande salle à manger, la cuisine, un salon, la salle d’étude, le bureau d’Eric Monnier dans lequel certains d’entre nous passèrent des moments difficiles et d’où l’on ressortait obligatoirement puni. Dans les étages les chambres de 4,3 et 2 lits assez sommairement meublées : lits, une ou deux chaises, une table une armoire (dans les chambres à quatre pas d’armoire mais chacun avait une table de nuit faisant office de petit placard). A chaque étage un coin WC. Au deuxième la salle de bain avec une rangée de cinq ou six lavabos et une douche dont l’eau chaude était fournie par une bouteille de gaz.
L’on prenait deux douches par semaines et cela se passait lors des séances d’études. A tour de rôle l’on y allait, à savoir qu’entre le moment où l’on quittait la salle d’étude et que l’on y revenait nous avions en tout et pour tout un quart d’heure pour aller chercher nos affaires de toilette dans la chambre et se doucher. Malheur à celui qui dépassait le temps imparti car Monnier montait et nous faisait sortir de la salle de bains peu importe l’état dans lequel nous étions (encore couverts de savon ou bien mouillés) la lanière de cuir du porte-clés jouant son rôle en cinglant nos fesses ou dos.
Tant pis pour celui qui n’avait pas assez d’eau chaude (bouteille de gaz vide…).
Nous devions tous amener de quoi faire notre lit. La consigne était : chaque matin défaire son lit, plier draps et couvertures avant le petit-déjeuner. Le lit étant fait au retour des cours et avant le déjeuner.
Monnier faisant le tour des chambres pour voir si cela était bien respecté. Malheureusement certains d’entre nous osaient ne pas suivre les règles et trouvaient toute la literie jetée par la fenêtre et quelque soit la météo…Par chance matelas et châssis de lit restaient dans la chambre. Ces lancers punitifs étaient effectués lorsque nous étions encore tous à table pour le petit déjeuner et l’on voyait par les fenêtres passer draps et couvertures.
Un jour l’un d’entre nous, adepte acharné de lecture, a poursuivi cette activité dans son lit, après l’extinction des feux, mettant le feu à sa literie, par chance sans plus de conséquences qu’un matelas un peu brûlé. On ne sait comment il a pu échapper au courroux de Monsieur Monnier….

Emilie

La cuisinière Emilie, femme qui à l’époque devait avoir une bonne quarantaine d’années et avait une « chambre » au sous-sol. D’un physique très peu avenant et d’une propreté plus que douteuse, il lui manquait un morceau de mollet et elle ne connaissait pas l’épilation. Visage non entretenu avec une que naissante. Elle portait la même blouse plusieurs jours de suite. Cuisinière était pour elle une nomination plus que surfaite car les plats qu’elle préparait ne faisaient que nous nourrir; la qualité, voire la quantité, étant plus que médiocre. Un soir, le coup de sifflet annonce le dîner, tout le monde descend des chambres et une fois assis nous avons tenté d’ingurgiter une soupe que personne ne put accepter. Monnier dû se rendre à l’évidence et ramassa les assiettes sans rien dire, la suite du repas fut froide, dans tous les sens du terme…. Le lendemain aucun d’entre nous ne descendit pour le repas. Monnier eut beau faire le tour des chambres personne ne bougea.
Il ne faut pas oublier les deux chats de la maison qui siégeaient dans la cuisine au milieu des plats et qui parfois se servaient.
Monnier s’occupait de la grande table et servait chacun d’entre nous que l’on aime ou pas. Aucun choix. Mme Monnier s’occupait d’une autre table avec le même rituel. Les filles Monnier (Monique et Florence) avaient chacune une petite table à charge.

Une manifestation !

Je ne sais plus pour quelle occasion, la quasi-totalité du Cévenol se retrouva, un jour de classe, au village. Nous savions par Monnier qu’il ne nous autorisait pas à y aller. Rien ne fit. La majorité des pensionnaires sont descendus au village outrepassant les ordres. Un certain nombre d’entre nous avions repéré Monnier au volant de sa Dauphine blanche et l’on tentait de se cacher ; ceux qui étaient découverts prirent une « engueulade » et étaient ramenés au Coin du Bois en voiture et ensuite consignés dans les chambres, privés de déjeuner. Monnier faisant plusieurs fois le trajet. D’autres sanctions tombèrent par la suite et la lanière de cuir de son porte-clés cingla le derrière de quelques têtes. Objet que chacun a bien connu car manié avec prestance et rapidité, il faut dire que Monnier l’avait en permanence entre les mains et rares étaient les fois ou cette lanière était attachée à sa ceinture.

Le goûter

De retour des cours enfin d’après-midi ; nous avions droit à une ou deux tartines (pain plus ou moins dur….pas de gâchis) de beurre(en était-ce vraiment ?) et confiture. Cela se passait soit à l’intérieur soit dans le « pré ». Des tartines supplémentaires, oui mais selon l’humeur de la cuisinière.

Sus au porridge !

Certains matins d’hiver, l’on servait du porridge au petit-déjeuner, si mes souvenirs sont exacts ce mets était confectionné par Madame MONNIER. C’était bon (un évènement !)et le rab trop rare ; ceux qui arrivaient à avoir au moins une cuillerée de plus se comptaient sur les doigts d’une main.

La salle d’études

La majorité des pensionnaires avaient une place dans cette salle sans aucun confort (comme le reste de la maison d’ailleurs !) ; dans le fond de la pièce un grand meuble fait de casiers sans fermetures. Tous les pensionnaires avaient libre choix de se servir dans le casier d’un autre. A ce sujet il faut dire qu’il y avait quand même un certain respect des affaires d’autrui. Des tables individuelles et des tables à deux voire trois garçons meublaient cette pièce. Pour faire respecter le silence et quand Monnier ne voulait se lever de son bureau ; il jouait du fouet…J’ai personnellement évité la lanière sur une oreille !
Ceux des grandes classes avaient le droit de travailler dans les chambres.
Pour ceux qui n’avaient pas la chance d’être en salle d’études, ils s’installaient dans la salle à manger sous la surveillance de Madame MONNIER. Ces élèves n’avaient donc pas de casiers et avaient droit à une étagère dans le bas du buffet-vaisselier. Les portes fermant très mal, les chats arrivaient souvent à s’introduire dans le meuble et une fois sur trois faisaient leurs besoins sur les cahiers et autres livres… Quel bonheur !!
Les chaises servaient aussi dans la salle à manger et à chaque repas on les trimballait d’un endroit à l’autre.

Le salon

Vous avez compris qu’au Coin du Bois les loisirs étaient peu nombreux. L’exigüité des lieux limitait les possibilités. Le salon, pièce assez petite dévolue à la lecture, meublée de quelques fauteuils dont l’un situé près de l’unique fenêtre était réservé à Madame Monnier ou bien sa fille Odile (grosse fumeuse de Gauloises). Un calme relatif y régnait. Quand par chance un fauteuil se libérait la place était aussitôt occupée. Quand Mr. MONNIER arrivait, il fallait de suite lui laisser une place auprès du vétuste poste de radio qu’il mettait en fonction pour écouter « ses » informations. Alors, assez souvent l’on voyait la pièce se vider de ses occupants.

Le bonheur est dans le pré

Quand le temps le permettait, nous nous retrouvions dans le jardin, après le déjeuner ou en fin de journée pour discuter ou fumer. C’était une sorte de pré jouxtant la pension. Par temps chaud, certains prenaient même des bains de soleil. Monsieur Monnier lui était adepte du slip, façon Tarzan, manifestement trop petit pour cacher son anatomie dont on apercevait régulièrement un testicule qui dépassait. Derrière la maison il y avait une barre fixe, Mr. MONNIER en était un grand adepte et portant son fameux slip… Certains pensionnaires l’accompagnaient dans cette activité.

Un anniversaire

Le jour de notre anniversaire, Mr. MONNIER nous donnait un bon pour choisir un disque chez l’unique disquaire du village. Il était convenu que par politesse il fallait prendre un 45 tours. Une fois l’un d’entre nous choisit le dernier album d’une idole française ( un 33 tours), finalement sur les conseils des plus anciens il dut le changer.

1960

Les conditions de vie au Coin du Bois paraissent aujourd’hui un peu rudes, mais c’était il y a 50 ans… La vie au Chambon c’était aussi le Collège, les copains et copines, les profs, les dimanches au village, les ballades en forêt, le ski en hiver, les jonquilles au printemps, les bains en jeans dans le Lignon et pleins d’autres bons souvenirs.

Noms de quelques uns des pensionnaires :

  • Christian SCHNEBELEN
  • Jack OPPENHEIM
  • Alain CREBEC (et son TEPPAZ)
  • Bernard MATHERN
  • Alain MATHERN
  • Philippe MATHERN
  • Pierre Olivier WANTZ
  • Akos B IRO
  • Francis ROBERT (fana de la barre fixe avec MONNIER)
  • Thierry ROBERT
  • Yves BELLET (parents ayant un hôtel à Valence)
  • Thierry GABERT
  • Daniel CLAVEROLLE
  • Bertrand DANGLADE (fana de voile)
  • Jean Philippe LANG (joueur de clarinette)
  • Armel MALAISE
  • Christian FLINIAUX
  • Jean Jacques REMBERT
  • Daniel MINOT (également avec son TEPPAZ)

Alain CREBEC, Armel MALAIZE, Pierre Olivier WANTZ, ont participé à l’élaboration de ce texte
Daniel MINOT 60/63

Lire aussi les commentaires et anecdotes du premier billet sur ce sujet (très sommaire mais richement commenté) : "La pension Monnier : Le Coin du bois"

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